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Dès que possible, sortir du nucléaire... par Dr J.Ch Vandenabeele Médecin de Prévention et ancien Maire-Adjoint d'Annecy-Le-Vieux

Photo_JCV.jpgMaintenant que la page des cantonales est tournée, revenons à des  préoccupations de fond qui concernent l'avenir énergétique du pays.

 

L'enjeu :

 

Pour qui n'a pas encore compris le danger permanent engendré par le nucléaire civil, véritable épée de Damoclès suspendue au dessus de nos têtes et surtout au dessus de celles de nos enfants, expliquons simplement deux choses :

   

  ° En ce début avril  2011, l'eau qui s'écoule des réacteurs de Fukushima contient de l'iode radioactif et du césium mais aussi du plutonium et présente un taux de radioactivité 4500 à 100.000 fois supérieur à la normale ce qui augure mal de l'avenir du peuple japonais (l'imprécision des chiffres étant en elle-même effrayante mais les dosimètres ont probablement été détériorés par le tsunami...)).

  ° Personne ne pourra revivre dans la ville de Pripiat, à côté de Tchernobyl, avant plusieurs siècles voire plusieurs milliers d'années, surtout que le sarcophage de béton posé en catastrophe en 1986 a une fiabilité de 30 ans, pas plus, et 2016, c'est demain...

 

Dès lors, il est évident que nous devons tout faire pour éviter un " Titanic technologique ", d'autant qu' il existe des solutions de remplacement non dange-reuses et durables utilisant  les éléments naturels tels que le soleil, le vent ou la mer.

 

On vous induit également en erreur en voulant vous faire croire que le nucléaire est moins cher alors qu'au contraire, notre pays continue à engloutir des fortunes dans cette énergie : voir les milliards investis en vain dans le projet ITER de fusion nucléaire ou bien le simple démantèlement du surgénérateur de Creys-Malville qui, non seulement a eu un coût prohibitif mais n'a fonctionné que 12 mois et a été abandonné à cause de sa dangerosité et de ses défaillances tout en nécessitant l'intervention de 400 personnes jusqu'en 2028 : jugez du coût.

 

Autre élément majeur : nous nous fournissons en uranium (énergie fossile donc limitée) auprès de quelques pays africains dont nous sommes de fait dépendants (le Niger essentiellement).

 

Pour juger de l'épée de Damoclès, rappelons la durée de la période radioactive de quelques isotopes importants (en fait, cela correspond à la durée nécessaire pour que la radioactivité diminue seulement de moitié) :

 

    ° L'iode 131 (utilisé en médecine) : 8,05 jours

    ° Le cobalt 60 :   5, 27 ans

    ° Le césium 137 (retrouvé au Japon et chez nous après Tchernobyl) :  30,2 ans

    ° Le radium 226 :  1600 ans

    ° Le plutonium 239 :  24110 ans

    ° L'uranium 235 :  704 millions d'années  !

    ° L'uranium 238 :  4,47 milliards d'années  !!

Ces deux derniers sont utilisés pour la fission dans les centrales nucléaires.

 

C'est pourquoi les terres agricoles seront inutilisables au nord du Japon pendant des décennies et c'est pourquoi également personne ne pourra revivre à côté de Tchernobyl.

 

Le point sur les 19 centrales nucléaires françaises (avec leurs 58 réacteurs) :

 

    ° Elles fonctionnent à l'eau pressurisée comme aux États Unis (et à Three Mile Island, 1ére catastrophe nucléaire en 1979 où le coeur avait commencé à fondre) les Japonaises fonctionnant à l'eau bouillante comme une partie des Russes qui, sinon, utilisent le graphite, une sorte de charbon très pur et inflammable (comme à Tchernobyl).

 

    ° Quelques unes ont été construites sur des zones sismiques (Fessenheim, Le Bugey, St Alban, Cruas-Meysse, Tricastin et limite pour Cadarache) avec une marge insuffisante de résistance au séisme (5,7 pour 5,2 sur l'échelle de Richter...rappel : 9 à 9,2 au Japon) et d'autres sont exposées à des ruptures de barrages notamment dans la vallée du Rhône.

 

    ° Elles vieillissent beaucoup, certaines ayant plus de 30 ans, et du coup, présentent de plus en plus d'incidents (1107 incidents déclarés en 2010) et surtout  n'ont pu prendre en compte les enseignements après les 2 catastrophes majeures de Three Mile Island et Tchernobyl, sans parler des accidents méconnus comme à Winscale  au Royaume Uni, à Chalk River au Canada ou en 1993 à Narora en Inde.

 

    ° Elles ont subi des accidents majeurs, non portés à la connaissance du public puisqu'il faut maintenir l'illusion du savoir-faire français :

 

        - en 1969, à St Laurent des Eaux, accident de niveau 4 (7 pour Tchernobyl).

        - en 1980, de nouveau à St Laurent des Eaux, accident de niveau 4.

        - en 1994, explosion à Cadarache (classé niveau 2) 1 mort.

        - en 1998 à Tricastin, contamination des rivières et de la nappe phréatique (les riverains n'ont pas été prévenus).

        - en 1996-97 à Creys-Malville, fuite de sodium explosif dans le barillet (on frôle la catastrophe) et effondrement du toit à cause de la neige !!

        - en 1999, au Blayais en Gironde en bord de mer, inondation lors de la grande tempête, un peu comme Tukushima. On a frôlé la catastrophe aussi ce qui faillit se reproduire avec la tempête Cynthia.

        - en 2008 à Pierrelatte, accident de niveau 2.

        - en 2008 de nouveau à Tricastin, accident de niveau 1.

        - en 2009 à Cruas-Meysse, bouchage de la source d'eau froide par les algues du Rhône. 

         - en 2011, défauts sur les générateurs de 8 centrales surtout à Tricastin (classé niveau 2).

 

    ° Le fameux EPR (en construction à Flamanville) dont on nous rebat les oreilles n'est rien d'autre que le même système, simplement mieux protégé par une double coque de béton armé, un coeur qui devrait tomber dans uns fosse située au dessous en cas de fonte accidentelle et un meilleur système de refroidissement. Pas suffisant, apparemment, puisque l'Autorité de Sûreté Nucléaire vient de demander un audit.

 

    ° Précisons, enfin, que Nicolas Sarkosy, dans son incohérence habituelle, demande maintenant (au Japon le 31 mars) des normes nucléaires internationales alors qu'il refusait "les tests de résistance" prescrits par les instances européennes pour nos centrales vieillissantes. Sans compter les actions successives visant à privatiser Areva ce qui, on l'a vu au Japon avec Tepco, induit toujours le risque de faire passer la rentabilité avant la sécurité, avec les conséquences que l'on connaît mieux maintenant.

 

La question sans réponse de la gestion des déchets :

 

    ° Nous ne saurons pas traiter les déchets nucléaires ultimes avant 2050, si tout va bien.

Et certains de ces déchets hypertoxiques puisque liés à la durée de la radioactivité déjà évoquée poseront un éternel problème de stockage.

Actuellement, les plus nocifs sont enchâssés  dans du verre fondu particulièrement solide mais il s'agit, évidemment, d'une solution transitoire et qui, cependant, doit résister pendant des millénaires...Les Allemands ont cru avoir trouvé une solution définitive en enfouissant leurs 100.000 fûts très radioactifs dans des mines de sel. Malheureusement, le sol est en train de bouger et de l'eau s'est infiltrée partout...En France, nous faisons actuellement la même erreur dans des carrières creusées en Champagne.   

 

    ° Et on oublie de dire que pendant des années les déchets nucléaires ont été déversés dans la mer, enfermés dans du béton qui, actuellement, est en train de se fissurer :  bien pour la qualité de nos poissons.

 

    ° Pour votre information, essayez de récupérer (auprès de la Criirad et de l'Andra = Agence nationale des déchets radioactifs) la carte de France des emplacements de stockage des déchets autorisés (1121 sites en France et aux DOM TOM...) ou quelques fois sauvages. Très récemment, on s'est ainsi aperçu que l'eau de Clermont-Ferrand était radioactive à cause d'un dépôt à l'air libre de substances contaminées effectué en catimini par Areva : inadmissible !    

 

L'incidence sur notre santé :

 

   ° Nous ne connaîtrons jamais le nombre exact de morts liés à la catastrophe de Tchernobyl, ceux qui sont décédés immédiatement, ceux parmi les 600 à 800.000 "liquidateurs" qui sont décédés avant 40 ans, les très nombreux cancers de la thyroïde déjà découverts et à venir surtout chez les enfants, ni les malformations découvertes dans les populations locales (sans compter tous les avortements spontanés). Beaucoup d'ouvriers de la Centrale, véritablement sacrifiés, ont dû être enterrés à 10 mètres sous terre et dans des cercueils plombés tellement ils avaient été contaminés.   

 

   ° On sait qu' en cas d'irradiation aigüe, au delà de 5 à 6000 milliSieverts reçus c'est à dire 5 à 6 Sieverts, la mort survient très rapidement par hémorragie interne, oedème cérébral et destruction du tube digestif.

 

   ° Entre 1000 et 5000 milliSieverts, le "mal des rayons" est un peu moins aigu avec des nausées et des diarrhées, une perte de cheveux, des troubles sanguins et un affaiblissement du système immunitaire.

 

   ° Pour les doses intermédiaires entre 100 et 1000 milliSieverts que ce soit pour des irradiations accidentelles d'ouvriers intérimaires mal formés (comme au Japon) ou pour les salariés chargés de la maintenance et accumulent des doses à longueur d'année (ils ne sont plus agents de l'EDF, ce serai trop cher !) des troubles sanguins puis un développement plus rapide de cancers (10 ans après) et de leucémies (6 ans après, en moyenne). Certains spécialistes prévoient pour ces travailleurs des pathologies type amiante c'est à dire apparaissant 30 ans après l'exposition aux rayons.

 

   ° Pour les petites doses répétées, une pollution accidentelle mais durable des cours d'eau (alors que, souvent, personne n'est prévenu) est en général corrélée à une augmentation des cancers. D'ailleurs, pour les enfants qui vivent à proximité de l'usine de la Hague (qui continue à effectuer des rejets radioactifs en mer...) les médecins généralistes ont observé une augmentation des leucémies. Mais comme par hasard, en France, les enfants sont souvent exclus des statistiques, on s'en est aperçu à Gilly sur Isère avec l'intoxication à la dioxine.

Personne ne peut prévoir l'impact sur la santé de nos enfants du nuage radioactif japonais qui, actuellement, continue de survoler notre pays et laisse son empreinte sur le sol à chaque pluie, sans oublier les essais nucléaires à l'air libre des années 50 qui ont empoisonné notre atmosphère sans jamais le dire.   

 

   ° Les 2 examens de base pour détecter les anomalies de la thyroïde (1er organe concerné) sont l'échographie, sans rayon ionisant, pour détecter les nodules et la TSH ultra-sensible, par prise de sang, pour détecter une anomalie du fonctionne-ment, éventuellement accompagnée des marqueurs spécifiques de certains cancers. Ensuite, votre médecin jugera de la suite à donner : rechercher si les nodules sont chauds ou froids (les cancers faisant partie des nodules froids), décider d'une ponction de nodule ou d'une intervention pour enlever tout ou partie de la thyroïde, suivie d'une analyse des tissus prélevés, en laboratoire spécialisé. 

 

Conclusion provisoire :

 

A Fukushima, dès que les 94 tonnes d'uranium et de plutonium en fusion parviendront au contact du béton, il ne leur restera que quelques mètres à parcourir pour s'extraire du bâtiment et aller empoisonner le sous-sol pour des milliers d'années, une hypothèse qui donne des sueurs froides à tous les (vrais) experts en sûreté nucléaire de la planète. De quoi faire réfléchir.   

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