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  • "Changeons 5% de nos achats et créons des centaines de milliers d'emplois"

    Robert Rochefort

    Robert Rochefort appelle à "une mobilisation générale pour le Produire en France", fondée sur une série de propositions concrètes à l'échelle nationale et européenne.

    Il fixe aux citoyens un objectif partagé : "modifier 5% de nos achats". "Si nous changeons un achat sur vingt, en privilégiant un produit Français plutôt qu'un produit étranger, nous diminuons de moitié le déficit de notre balance commerciale", a-t-il prôné lundi sur Europe 1.

    « Défendre le 'Produire en France', ce n'est pas forcément défendre ce qui appartient aux entreprises françaises. Il vaut mieux pour notre économie une voiture Toyota fabriquée en France, que des voitures d'entreprises françaises qui sont fabriquées à l'étranger », a déclaré en préambule Robert Rochefort. Un rappel nécessaire à ses yeux, car « les critères du 'Made in France' sont pour le moment un total cafouillage, illisible pour le consommateur ».

    « Certains disent que c'est la dernière ouvraison qui compte. D'autres, qu'il faut que plus de 50 pour cent du produit proviennent de France. C'est cette seconde définition que je préfère. Il ne s'agit pas de dire qu'il faut du 100 pour cent, mais qu'une majorité de la valeur ajoutée soit française. Se fonder sur la valeur ajoutée, cela signifie prendre en compte que les composants, mais aussi le montage, le design, etc », a souligné l'ancien dirigeant du Credoc. Le rôle de la nouvelle « Marque France », voulue par le gouvernement, doit donc être de « garantir et de certifier le fait que le produit est fabriqué en majorité sur notre territoire », propose-t-il.


    « Nous avons vécu pendant des années, en estimant qu'acheter des produits venus du monde entier était un atout de la mondialisation. La grande distribution a beaucoup joué sur des campagnes de promotions avec des fraises au mois de janvier. Nous nous retrouvons à avoir des poires françaises dans les rayons des supermarchés, en même temps que des poires du Pérou. Elles sont quasiment au même prix, mais une nette différence de qualité », constate le parlementaire.

    Pour le vice-président du Mouvement Démocrate, la responsabilité incombe avant tout « aux gouvernements successifs, sans distinction ». « Je les accuse d'être responsables de l'effondrement de notre production. Même le gouvernement actuel, par rapport au gouvernement précédent, est frileux sur ce sujet. À ses yeux, cela reste parfois comme si nous ressuscitions Georges Marchais ou que nous faisions la promotion de Marine Le Pen. Les mentalités doivent évoluer », appelle-t-il de ses vœux.

    Le parlementaire pointe aussi la responsabilité des collectivités, qui font souvent au plus rapide et au plus pratique, sans intégrer ce geste citoyen. « En faisant le tour des communes de France, j'ai découvert que la très grande majorité des pavés utilisés pour refaire les rues vient de Chine. Souvent, ils ne sont pas moins chers, mais ils sont livrés plus rapidement que les pavés français. Depuis que j'ai mis ce point en lumière, beaucoup d'élus locaux du MoDem ont bloqué leurs appels d'offres : ils décalent de quelques mois la réalisation de leurs travaux de voiries, mais intègrent les pavés français dans leurs commandes », se réjouit-il.

    « MISONS SUR LA QUALITÉ ET PROLONGEONS LES DURÉES DE GARANTIES »

    « Nous pouvons activer trois leviers : consommer autrement, consommer mieux et avoir de la qualité. D'abord par l'innovation. Elle va permettre que le prix un peu plus élevé corresponde effectivement à une meilleure qualité. Pour valoriser ce niveau de qualité, nous proposons avec François Bayrou que la garantie obligatoire des produits français passe à cinq ans, au lieu d'un ou deux ans actuellement. Ainsi nos produits pèseront davantage face à la concurrence », poursuit l'eurodéputé.

    « Prenons par exemple un grille-pain. Si vous ne vous fondez que sur son prix d'achat, la situation est intenable : la production française ne tient pas face à la production chinoise à bas prix. En revanche, comme le grille-pain français est de qualité, vous le garantissez cinq ans et vous donnez alors une chance à celui qui le fabrique de le vendre, sans léser le consommateur. Le consommateur, d'autant plus s'il a un faible pouvoir d'achat, aura tout intérêt à acheter un produit un peu plus cher qui dure longtemps, plutôt que de continuer à acheter le produit à bas prix qu'il doit changer tous les ans », démontre Robert Rochefort.

    Même chose pour les entreprises publiques : « Je me suis fait engueuler par la Poste, car j'ai dénoncé le fait qu'elle achète des scooters taïwanais. La direction de l'entreprise m'a prétexté que le prix était 20 pour cent moins cher que chez un fabriquant français. Mais ont-ils par exemple pensé aux délais de réparation ? », s'interroge l'eurodéputé. « Lorsqu'un scooter taïwanais est défectueux, il faut trois ou quatre mois pour le réparer, car le concessionnaire local n'a pas l'habitude ou les pièces ne sont pas disponibles. Le scooter taïwanais génère donc un manque à gagner plus important que le scooter français. Cela démontre qu'il ne faut pas uniquement regarder le prix d'achat, mais aussi aussi penser à la vie du produit », détaille Robert Rochefort.

    « LES FRANÇAIS SONT SUR LE POINT DE TRADUIRE LEURS INTENTIONS EN ACTES »

    Une très nette majorité de Français se déclare prête à acheter davantage de produits français. Pour le vice-président du Mouvement Démocrate, « ces intentions précèdent les comportements ». « Prenons l'exemple du tri sélectif. Pendant des années, les Français ont dit qu'ils trouvaient cela citoyen ou qu'ils le faisaient, avant de le faire effectivement. Ils disent aujourd'hui qu'ils sont conscients qu'il faut produire et acheter français, sinon nos gosses iront tous à Pôle emploi. Dans quelques temps cela se traduira par des actes », analyse-t-il.

    Pour Robert Rochefort, les Français doivent aussi redevenir fiers de leur production. « Il ne faut pas opposer nos exportations et le marché intérieur. Je ne connais pas de pays qui exporte bien, sans être d'abord un pays qui a confiance en ses produits. Cela fait une trentaine d'années qu'en France nous ne sommes plus fiers de ce que nous fabriquons. Notre pays d'intellectuels a mis en retrait le travail manuel, au point d'avoir finalement un peu honte de sa production. Or, si vous prenez le Japon, l'Allemagne, les États-Unis, la Suisse... ils réussissent leurs exportations parce qu'ils sont fiers de leurs produits », souligne-t-il.

    UN OBJECTIF QU'IL EST POSSIBLE D'ATTEINDRE : « MODIFIER CINQ POUR CENT DE NOS ACHATS ».

    « Ce que je propose à l'ensemble des consommateurs et des pouvoirs publics, c'est de lancer une mobilisation générale dont l'objectif est de modifier 5 pour cent de nos achats. Si nous changeons un achat sur vingt, pour préférer un produit français à un produit étranger, nous réduisons de moitié le déficit de notre balance commerciale. Nous créons en même temps plusieurs milliers, voire plusieurs centaines de milliers, d'emplois en France. Et ça ne coûte pas un centime aux finances publiques », affirme l'économiste.

    Cette ambition à court terme, doit s'accompagner « de réformes de structures » qui renforceront notre production à plus long terme, comme par exemple « développer la souplesse dans nos entreprises », juge Robert Rochefort. « Depuis trente ans, nous croyons que les machines tuent les emplois des ouvriers. C'est une grave erreur ! Les machines enlèvent de la contrainte aux humains et augmentent la productivité. Une usine très automatisée génère toujours de l'emploi en son sein et nécessite trois fois plus d'emplois autour d'elle, avec la fabrication des machines, leur entretien, etc », pointe-t-il.

    « PROTÉGER NOTRE PRODUCTION NÉCESSITE DE RECONSTRUIRE L'EUROPE »

    Pour le vice-président du MoDem, les solutions sont aussi européennes. « La semaine dernière, j'avais un dialogue avec le ministre irlandais qui s'occupe de la Production pendant la présidence tournante de l'Union européenne. Je lui ai souligné que l'Europe ne doit pas ouvrir tous ses marchés publics au marché chinois, sans imposer de réciprocité », pointe-t-il avec conviction.

    « Nous devons aussi construire une Europe différente. L'Union a soutenu les entreprises des pays 'nouveaux entrants' pour qu'ils puissent se développer. Le niveau de vie des populations s'en est nettement ressenti et c'est une bonne chose. Mais elle l'a fait de façon trop inégalitaire. Nous devons aussi harmoniser les réglementations. Les entreprises françaises ont parfois l'impression de courir avec des chaussures de plomb, face à des concurrents qui n'ont pas les mêmes contraintes », déplore le vice-président du MoDem.

    C'est le cas dans le domaine de l'agroalimentaire : « Nous nous sommes fait piquer la place de premier producteur par l'Allemagne, car elle n'a pas de salaire minimum dans ce secteur, ce qui la rend plus compétitive. Ce n'est pas juste », dénonce Robert Rochefort. La seule solution, c'est de « travailler à une harmonisation de la fiscalité des vingt-sept États membres, en particulier de l'impôt sur les sociétés, et du modèle social, en commençant par les retraites ». « Dans un an, les citoyens auront à élire de nouveaux députés européens. Ils doivent mettre cette question sur la table et demander qu'elle figure dans les programmes », conclut le parlementaire.

  • Info médias

    Ce dimanche 3 février sur Canal+, François BAYROU sera l'invité d'Anne-Sophie LAPIX dans l'émission Dimanche + !