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Message de Sylvie GOULARD

Rien n’est gratuit, ni la paix, ni la sécurité des personnes, ni la liberté. Rien n’est jamais acquis à l’homme. Voilà ce que les enfants gâtés des Lumières et de « l’après-guerre », que nous sommes, devraient se répéter tous les jours.

L’Europe est une communauté de valeurs, fondée sur le respect de la dignité humaine. La paix, la vie n’ont pas de prix.

 

Ce genre de phrases, ces derniers temps, valait à ceux qui les prononçaient des sourires narquois et des critiques acerbes. Justifier l’Europe par la paix était « banal ». Défendre les droits de l’homme, la dignité, l’égalité hommes-femmes, lutter contre les discriminations était « ringard ». C’était « un sermon politiquement correct ». Du moins, face à des publics qui ont toujours vécu sans périls, et croient ces bienfaits garantis, ces exhortations semblaient bien abstraites.

 

Quand douze personnes – des dessinateurs, des journalistes mais aussi des policiers, une assistante, un agent de maintenance – perdent la vie,  agressés à la mitraillette, en plein Paris, ces mots sonnent un peu différemment.

 

L’attentat contre Charlie Hebdo a été perpétré avec des armes de guerre. La liberté d’expression, la création, l’insolence ont été traités à la Kalashnikov par des juges fous, auto proclamés. Nos valeurs ont été condamnées à mort sans procès, sans droit de la défense, sans pitié.

 

L’invocation du blasphème nous ramène des siècles en arrière. Sur ce continent aussi, au nom de Dieu, par le passé, l’intolérance a conduit à l’assassinat. Les philosophes des Lumières et les esprits libéraux du XIXème siècle se sont battus pour que la liberté de croire, et de pratiquer son culte, soit accompagnée de la liberté de ne pas croire, et de le dire.

 

Le mot de « vengeance »,  employé par les assassins, n’est pas moins archaïque. La vengeance entraîne la guerre qui entraîne la vengeance qui entraîne la guerre. L’Europe a connu cette spirale diabolique de la violence. Et elle en est sortie.

 

Si l’on prend conscience du chemin parcouru, si l’on mesure l’incroyable rupture introduite entre 1945 et 1950 avec  d’une part, la protection des droits humains, au premier rang desquels dignité et liberté, et d’autre part le refus de la vengeance, alors l’union libre et pacifique des Européens retrouve sa grandeur.

 

Puisse ce crime faire comprendre aux Européens, aux Français quels sont les vrais enjeux. J’ai reçu, d’Europe, du monde entier, des dizaines de messages de soutien, des invitations à continuer le combat pour la démocratie et les droits fondamentaux. Je remercie tous ceux qui ont pris cette peine.

 

La France, hier soir, dans le cœur du monde, était de nouveau le phare de la liberté. Et la réaction spontanée de milliers de Français, rassemblés dans les rues, laissait penser que c’était bien ainsi que le pays le vivait. En écho, des milliers de personnes dans l’Union européenne et dans le monde, se sont aussi rassemblées.

 

Certains appellent à se venger des vengeurs, à se mettre à leur niveau, en rétablissant la peine de mort. Outre qu’elle n’a jamais dissuadé les criminels d’agir, la peine de mort est bannie d’Europe. Ce n’est pas par hasard. La civilisation consiste à considérer que  même au nom de l’ordre public, l’homme ne peut pas porter la mort. Nous pouvons en être fiers.

 

Certains voudraient incriminer tous les musulmans alors que l’immense majorité des musulmans d’Europe rejettent ces assassinats. Et que l’ensemble des responsable des organisations musulmanes de France ont fermement condamné ces actes. Il est important qu’ils le fassent et que des fidèles de l’islam s’expriment, à leur tour, sans ambiguïté.

 

L’essentiel désormais est de se tenir debout et que tous ensemble, croyants de toutes confessions et non croyants, nous réaffirmions notre attachement aux valeurs de la République et de la Charte des droits fondamentaux européenne.

 

Au-delà des affirmations solennelles, nous devons aussi réfléchir à ce qui a pu transformer certains jeunes, élevés en Europe, en monstres froids prêts à égorger ou abattre des frères humains. Et réagir, dans les écoles, les municipalités, au niveau national, au niveau européen, inlassablement, pour éduquer et convaincre les esprits, pour faire vivre concrètement ces valeurs, pour améliorer et défendre les institutions communes.

 

Nous devons aussi veiller à ce que l’Union Européenne respecte les principes qu’elle affiche, sans complaisance.

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