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"Je propose une unité nationale d'une période de trois ans, qui s'accorde sur les grands choix"

Emploi, moralisation politique, retraites, réforme de l'État : François Bayrou appelle à "l'unité des réformistes" pour provoquer le "choc de confiance" dont notre pays a besoin, dans une interview à Pyrénées Presse, publiée lundi.

Pyrénées Presse - Le week-end dernier, un sondage indiquait que 78 % des Français étaient pour l'union nationale et que 47 % d’entre eux pensaient que vous pourriez en être la figure de proue.

François Bayrou - C’est intéressant. Cette idée progresse beaucoup. Il y a encore quelques mois, les responsables politiques étaient sceptiques. Mais on a vu ces derniers jours beaucoup de déclarations allant en ce sens, des gens aussi différents que Jean-Louis Borloo, François Fillon, Benoît Apparu ou Gérard Collomb, avancer des idées qui avalisent cette démarche. Jean-François Copé lui-même a dit hier qu’il faut un nouveau 1958. Or, en 58 le général De Gaulle a obligé la droite, la gauche et le centre à participer à la reconstruction des institutions. C’est très important car il y a un certain nombre de réformes qui ne peuvent pas entrer dans la réalité sans un accord transpartisan. 

Lesquelles ?

L’ensemble des réformes à faire pour que les emplois se créent et pour provoquer un choc de confiance qui rassure ceux qui entreprennent et signent les contrats de travail. La confiance sera plus grande si les réformes sont soutenues au-delà des frontières des camps. De même réformer l’État pour qu’il soit plus efficace et moins cher ne peut s’imposer avec le soutien d’un seul camp. On le verra pour la réforme des retraites. Et pour la moralisation de la vie politique, tous les grands courants politiques doivent y participer si l’on veut aboutir. 

Et ces réformes vous paraissent impossibles actuellement ?

Depuis des décennies, les pouvoirs qui se succèdent sont toujours minoritaires. Cette usure du pouvoir est logique. On nous dit que le pays est coupé en deux mais il faut aller plus loin : chaque camp est lui-même coupé en deux, Mélenchon-Hollande, Le Pen-UMP. À chaque fois on constate qu’après quelques semaines, le pouvoir est ramené à 25 % de soutien de l’opinion publique. Et avec seulement 25 % de soutien, on ne peut rien faire de sérieux. 

Avec qui faire l’union ?

Le mot union est inadapté, parce qu’il laisse entendre qu’on pourrait associer dans un gouvernement Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. En revanche, l’esprit d’unité nationale qui permet de s’accorder sur de grands choix, pour une période donnée, est crucial. L’esprit d’unité conduit à ce que les grandes forces se mettent d’accord sur l’essentiel des réformes à faire pour que nous retrouvions notre place en Europe. On peut accepter des accords pour un temps limité sans perdre son identité, de gauche, de droite ou du centre. On pourrait se mettre d’accord sur une période de trois ans pendant laquelle on va soutenir des projets d’intérêt national comme les décisions à prendre pour aider l’emploi.

Par exemple ?

Par exemple, les 20 milliards de crédits d’impôts pour les entreprises sont mal dirigés. Il faut les réorienter vers un soutien réel à l’emploi. Avec cette somme, on pourrait accorder deux embauches par entreprise sans charge. On peut rendre à nouveau possibles les heures supplémentaires à charges allégées. Il y a aussi une réflexion à mener sur le contrat de travail, trop souvent dissuasif. Ou encore alléger les seuils des entreprises (obligations particulières des entreprises à partir de 10 salariés, de 50, etc.). Dire par exemple que le seuil passe de dix à vingt salariés pour trois ans. Il faut un vrai choc de confiance pour changer le climat. Sur tous ces thèmes de redressement, on peut trouver un accord entre les réformistes républicains des deux rives.

Et l’idée d’une 6e République ?

Si c’est un retour à la IVe République, je suis contre. L’institution présidentielle est nécessaire pour la cohérence au sommet de l’État. Mais une vraie séparation des pouvoirs, un parlement qui représente vraiment les Français, cela, c’est vital, et cela s’imposera. Quand on aura constaté le double échec des politiques menées depuis dix ans, qu’est ce qui pourra tirer la France de l’ornière ? Soit ce seront les extrêmes, porteurs de risques très graves comme la sortie de l’euro, et un mythique retour au Franc. Le doute et le soupçon envers notre pays seraient tels à l’étranger que nous serions dans une terrible déstabilisation que les plus pauvres paieraient les premiers. La seule solution, c’est ce choc de confiance, cet accord entre réformistes qui permettra de franchir les obstacles infranchissables. C’est comme en montagne : il faut parfois se mettre tous en cordée pour avancer.

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